Sous nos yeux
Du 28.03 au 23.08.26 à Z33
L'acte de regarder n'est jamais neutre. Ce que nous choisissons de voir, et ce dont nous détournons les yeux, dit quelque chose de nous. L'exposition Before Our Eyes explore la manière dont dix artistes (inter)nationaux s'interrogent sur cette responsabilité et y naviguent. Leur travail répond aux événements politiques de notre époque, avec une attention particulière pour la violence génocidaire en Palestine, à travers des images qui prennent position ou appellent à la réflexion. Car comment les artistes peuvent-ils s'attaquer à la violence ? Non pas en la montrant à nouveau, mais en choisissant soigneusement ce qu'il faut rendre visible et ce qu'il faut retenir.
Le regard comme sujet
La première œuvre de l'exposition, un film muet d 'Angharad Williams, montre un gros plan du visage de l'artiste. Ses yeux sont posés à côté de la caméra ; ce qu'elle voit reste hors champ. Ses lèvres bougent, mais ses paroles sont inaudibles. Le film propose une réflexion sur la relation entre voir et parler : peut-on parler de ce que l'on voit, et nos mots ne sont-ils pas à côté de la plaque ? Rabih Mroué s'interroge également sur le rôle du spectateur. Dans son film Black Boxes, il présente des collages de coupures de presse sur les guerres récentes au Moyen-Orient, accompagnés d'une bande sonore. En présentant les collages derrière une lentille spéciale, l'œuvre crée à la fois une distance et une proximité avec les événements.
Entre la parole et le silence
Comment rendre visible la violence tout en respectant les personnes qui en sont victimes ? Que faut-il révéler et que faut-il taire ? Dans ses peintures, Rosalind Nashashibi utilise des symboles - fleurs, cygnes, pierres - qui renvoient à l'histoire de l'art et à la réalité palestinienne. Hamishi Farah évoque la figure du "témoin" comme une colonne de sel, dans des peintures inspirées de l'histoire biblique de Lot. Les portraits de Marlene Dumas ne montrent pas non plus directement la violence à Gaza, mais dépeignent deux visages qui regardent la dévastation. Leurs yeux traduisent une impuissance tranquille.
Révéler et dissimuler
Pour certains artistes, ce que l'on ne voit pas est au moins aussi important que ce qui est visible. Dans les intérieurs vides de Mohammed Sami, la violence résonne précisément à travers ce qui reste invisible. Luc Tuymans crée une peinture murale monumentale à partir d'une image qui ne révèle pas immédiatement son origine ou sa signification. À l'inverse , Ryan Cullen confronte le spectateur à la violence militaire dans des détails crus et directs : des gros plans sur des prises de retenue réduisent la violence d'un État à son essence - l'assujettissement de l'autre par la seule force physique.
Traces d'une vie
Le duo de réalisateurs Sirah Foighel Brutmann et Eitan Efrat examine l'histoire d'Israël et de la Palestine à travers les yeux du père de Sirah, le photojournaliste André Brutmann. Ses archives entremêlent des séquences d'actualité et des photographies personnelles, créant ainsi un récit stratifié de la mémoire et de l'histoire. Marianne Berenhaut crée une image de brisure dans un assemblage de 150 fragments de miroirs. La même fragilité résonne dans Jardin d'enfants, où six chaises d'enfant cassées se dressent sur un sol carrelé. En donnant une nouvelle vie à des objets voués à la destruction, elle accomplit un acte de résistance et de mémoire.
Avec des œuvres de
Marianne Berenhaut, Ryan Cullen, Marlene Dumas, Hamishi Farah, Sirah Foighel Brutmann & Eitan Efrat, Rabih Mroué, Rosalind Nashashibi, Mohammed Sami, Luc Tuymans en Angharad Williams.
Commissaire d'exposition : Tim Roerig
Images de presse
Marlene Dumas, Last Man Standing, 2023 Huile sur toile, 50 x 40 cm Avec l'autorisation de l'artiste et de la Frith Street Gallery, Londres Photo de Peter CoxContact
Veerle Ausloos
